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La pénibilité au travail en EHPAD, post de Sylvain Guillaume

Dernière mise à jour :

Fiche pratique n° 2262

penibilite-travail-ehpad 1

Reconnaître la pénibilité du secteur de la relation d’aide en favorisant l’implication affective des salariés par la création de journée pénibilité pour les EHPAD relevant de la fonction publique territoriale

Problématique générale :
 Problématique : La gestion du temps de travail souffre quelquefois dans les maisons de
retraite relevant de la fonction publique territoriale d’une incohérence majeure ; les salariés
récupèrent tous les jours fériés, même lorsqu’ils ne les travaillent pas, des jours fériés
« illégaux » dit « journées du Maire » peuvent apparaitre, le 1er mai peut être mal calculé au
niveau récupération. Au global, des salariés d’établissements similaires peuvent avoir des
congés supplémentaires dont le nombre varie en fonction de pratiques différentes de la
gestion du temps de travail.


Objectifs stratégiques : La dénonciation de ce mode de fonctionnement par les Directions
peut être également un moment clé dans l’histoire de la structure pour mettre en place un
dispositif reconnaissant la pénibilité en l’intégrant dans la politique de rémunération par la
création de congés pénibilités.


 Les différents types d’effets attendus de cette composante d’une rémunération :
 Fidéliser : Les techniques de fidélisation sont toutes les pratiques susceptibles d’inciter les
salariés à rester dans l’entreprise plutôt qu’à changer d’employeur. Les journées pénibilités
peuvent être considérées comme étant une forme de promotion par la reconnaissance de la
difficulté de certains postes.
 Valoriser : Toute personne a besoin de développer une estime de soi favorable. La mise en
place de journée pénibilité peut contribuer à la fois à la valorisation externe du salarié qui en
bénéficie (vis-à-vis des salariés des autres établissements) mais également à la valorisation
interne (par rapport aux autres salariés de l’établissement) car basé sur l’équité.
 Impliquer : en développant un « sentiment de fierté d’appartenir à une organisation » qui
reconnait la pénibilité de certains postes et tout en favorisant « le bien-être au travail et en
conciliant le rendement » comme le note C. VANDERBERGHE*


Au niveau de la gestion des ressources humaines, ce peut être l’occasion à partir de la
fin d’un système de gestion du temps de travail « illégale » de mettre en place une
stratégie de différenciation par l’innovation, par l’octroi d’un nombre de jours différenciés
en fonction de la pénibilité, permettant de promouvoir une implication affective du
personnel.


I) Le mode de calcul de récupération des jours fériés : des règles connues mais
appliquées de manière hétérogène sur le territoire national

 Les jours fériés hors 1 er mai : Un jour férié (sauf le 1er mai) sera considéré comme un jour
normal. Toutefois il sera le plus souvent chômé, mais peut aussi, pour les besoins du service,
être travaillé comme c’est le cas dans les EHPAD relevant de la fonction publique territoriale.
 Si le jour férié est un jour habituellement chômé : il n’est pas rémunéré (c’est le cas pour
les salariés travaillant en semaine fixe : En général pour les secrétaires, directeur c’est-à-dire
de manière globale pour les postes administratifs, agent relevant des services techniques,
animatrice… ).


*Vanderberghe C, Concilier le rendement et le bien-être au travail : le rôle de l’engagement
organisationnel ». Montréal, Québec, Editions Nouvelles, 2003.

*Si le jour férié est exceptionnellement travaillé : il est alors rémunéré en heures des
dimanches et jours fériés, comme c’est le cas pour les autres catégories (rémunérés en
prime dimanche et jours fériés avec récupération heure pour heure.


Principe : « la non récupération des jours fériés habituellement non travaillés*  »…« Un agent
ne peut prétendre à aucun jour de congé supplémentaire, ni aucune indemnité
compensatrice lorsqu’un jour férié tombe un jour habituellement non travaillé*  ».


Le cas particulier du 1 er mai 4
Le 1 er mai est considéré comme « exceptionnellement travaillé et habituellement non
travaillé » (logique du roulement). S’il est travaillé, il est rémunéré deux fois en heures des
dimanches et jours fériés. S’il n’est pas travaillé (chômé) : il est payé mais pas récupéré
Ces règles sont appliquées de manière disparate sur le territoire national et il n’est pas
rare de voir des EHPAD, faire abstraction de la réglementation, mais cette dernière est
rappelée régulièrement par les chambres régionales des comptes.


II) La problématique des « journées du Maire » au regard de la jurisprudence

 Une jurisprudence du Conseil d’Etat difficile à appliquer : Le Conseil d'Etat * , a précisé
que, dans l'hypothèse où des agents bénéficiaient, antérieurement à la date d'entrée en
vigueur du décret du 25 août 2000 (sur l’accord relatif aux 35 heures), de jours de congés
excédant les jours légaux, il appartient à l'autorité compétente, si elle leur maintien cet
avantage, de le concilier avec le respect de la durée annuelle de 1607 heures de temps de
travail, en instituant par exemple un cycle de travail hebdomadaire supérieur à 35 heures.
Conséquences directes : il convient aux salariés de prouver que ces congés supplémentaires
existaient avant le décret du 25 aout 2000. Or souvent il n’y a pas écrits ; en outre les
salariés devront tout de même respecter la durée annuelle effective soit 1607 heures et
donc travailler plus de 35 heures et bénéficier de jours RTT.


 La Chambre Régionale des Comptes, juridiction financière qui contrôle le secteur public,
est en revanche très claire*  : les journées du maire sont illégales : elle relève que ce type de
journées de congés dits « du Maire », étaient « non conformes à la réglementation », exige
une suppression, même si le contrôle de légalité l’a jugé conforme. Le Conseil
d’Administration doit les annuler par délibération sous un mois. Maintenir les journées du
maire aboutit donc à une forte insécurité juridique.


 Ces jours ne peuvent pas être considérés comme un usage au sens de la jurisprudence.
Un usage d'entreprise correspond à une pratique instaurée par l'employeur dans son
entreprise qui se traduit par l'attribution d'un avantage au profit des salariés. Il y a 3 critères
cumulatifs : la généralité : l'avantage est accordé soit à tous les salariés, soit au moins à une
catégorie d'entre eux ; la constance : l'avantage est accordé de façon répétée ; la fixité :
l'usage est déterminé selon des règles préétablies et précises. Une condition
complémentaire développée par la jurisprudence exclut très clairement la notion d’usage
*https://vosdroits.service-public.fr/particuliers/F24496.xhtml
*Un jour férié tombant un samedi ou un dimanche habituellement non travaillé ou un jour de temps
partiel ne peut pas être récupéré. L’agent à temps partiel ne peut pas non plus déplacer son jour de
temps partiel.
*https://www.cdg01.fr/CDG01/img/pdf/2013_01_jour_ferie.pdf
*Conseil d’Etat, Syndicat CDMT ANPE, 30 juillet 2003.
*Rapport de la Chambre régionale des comptes de Picardie du 17 janvier 2011.

*dans la plupart des situations rencontrées par les EHPAD relevant de la fonction publique
territoriale 7  : Il ressort de la Cour de Cassation « que dans les établissements privés gérant
un service social ou médico-social à but non lucratif et dont les dépenses de fonctionnement
sont supportées directement ou indirectement par une personne morale de droit public ou
un organisme de sécurité sociale, un accord collectif à caractère salarial ne peut légalement
prendre effet qu'après agrément ministériel, conformément à l'article L. 314-6 du code de
l'action sociale et des familles. Les salariés des EHPAD territoriaux, étant rémunérés par la
puissance publique (conseil départemental et assurance maladie), tout ce qui est lié à la
rémunération (prime et congés) nécessite un agrément. La jurisprudence est constante 8 et a
donc refusé la dénomination d’usage.


NB : Un usage se dénonce très facilement : la dénonciation doit juste faire l’objet 9 :
d’une information (et non accord) aux institutions représentatives du personnel (en l’espèce
le Comité Technique), d’une information individuelle de chaque salarié concerné, d’un délai
de préavis suffisant (3 mois) ; elle s’impose aux salariés.

 La notion de « droits acquis » ne « fonctionne pas en droit public »
Les salariés des EHPAD territoriaux ne pourraient se prévaloir de la notion juridique de droit
acquis au regard de la jurisprudence. Ainsi le Conseil d’Etat est clair sur une des cas
similaires* : « … Des agents de la Police d’Etat sont des fonctionnaires placés dans une
situation statutaire et réglementaire et ne peuvent donc utilement soutenir que la prise en
compte de deux jours de congés supplémentaires accordés antérieurement à la réduction
des 35 heures (ils souhaitaient le conserver) aurait illégalement porté atteinte à des droits
acquis …».


Un risque supplémentaire : une contradiction que les financeurs pourraient lever et
objecter lors des négociations de CPOM (contrat pluriannuel d’objectif et de moyen) et de
contrôles. Au niveau national, lors de la création des 35 heures, des postes ont été créés
(notamment par les financeurs, le Conseil Général et la DDASS) pour permettre le passage
des 39h à 35h. Or dans certains cas, il n’y a pas eu création de poste au motif, au regard d’un
arrêt, que des particularités de la durée du travail (jours de congés supplémentaires, par
usage), pouvaient justifier la décision du ministre de mettre en place un « dispositif de
réduction du temps de travail non aidé »*.


III) La reconnaissance la pénibilité est au cœur des politiques publiques
 La notion de pénibilité 

Un travail pénible se définit comme un travail « qui se fait avec peine »* . Cette définition
« généraliste » illustre la subjectivité liée à la notion de pénibilité. Le concept de pénibilité
appliqué au travail est complexe, car ce qui peut être ressenti pénible pour un travailleur ne
l’est pas nécessairement pour un autre. Les parcours professionnels sont à prendre en
*Cour de cassation, chambre sociale, Audience publique du mercredi 9 novembre 2011
*Soc., 8 juin 2005, pourvoi n° 02-46.465, Bull, 2005.
*Miglietti, J.M, Avocat au Barreau de Lyon, www.miglietti-avocat.com, 2006.
*Conseil d'État, N° 256658, recueil Lebon, Section du Contentieux, 5 juillet 2004.
*Conseil d'État, N° 215395, recueil Lebon, Mlle Fombeur, 11 décembre 2000.

*MARPEAU I, La loi sur la pénibilité au travail: opportunité de changement ou contrainte
supplémentaire pour les EHPAD - Mémoire de Mastère, ESCEM, 2012.

*www.larousse.fr

*compte, mais également les parcours de vie en ce sens qu’ils influencent tous les deux le
physique, et le mental. A cela s’ajoute un ensemble de facteurs issus de l’environnement qui
interviennent de façon plus ou moins objective. « La notion de pénibilité est issue de la
rencontre entre un environnement de travail et un salarié. » 14 Chaque individu étant unique
et chaque situation singulière, aborder la question de la pénibilité, conduit à s’interroger sur
les facteurs de risque, à identifier et à évaluer les facteurs de pénibilité en ayant bien à
l’esprit que ces notions sont étroitement liées.


La pénibilité au travail est au cœur des politiques publiques*
Comme l’indique l’URIOPSS*, si les textes législatifs traitent principalement de la prévention
en matière de santé et de sécurité des salariés, « ces notions sont indissociables de la
prévention des situations pénibles de travail ». On peut citer :
 La directive européenne n° 89/391 : vise à l’amélioration de la sécurité et de la santé des
travailleurs.
 La loi du 31 décembre 1991, introduit une obligation générale à la charge de l’employeur,
de prévention en matière de santé et de sécurité au travail.
 Les Arrêts de la Cour de Cassation sociale indiquent que l’obligation de l’employeur en
matière de sécurité et de santé au travail, est une obligation de résultat.
 Les Article L 4121-1 et suivants du code du travail indiquent que l’employeur doit prendre
les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale
des travailleurs.


 Loi du 9 novembre 2010 : portant réforme des retraites qui introduit la notion de
pénibilité au travail et de sa prévention. La loi définit la pénibilité* « comme l’exposition à
un ou plusieurs facteurs de risques professionnels liés à des contraintes physiques marquées,
à un environnement physique agressif ou à certains rythmes de travail susceptibles de laisser
des traces durables identifiables et irréversibles sur la santé du salarié ». La pénibilité est
donc caractérisée par deux conditions cumulatives. Enfin la loi du 9 Novembre 2010 sur la
réforme des retraites prévoit « que les entreprises d’au moins 50 salariés, dont au moins
50 % des effectifs sont exposés à certains facteurs de risques, doivent être couvertes par un
accord ou un plan d’action de prévention de la pénibilité.

 Le décret du 30 mars 2011 (art D4121-5 du code du travail) : définit 18 , les facteurs de

*TEMPO, Travail Emploi Populations, ANACT, 2011.
*Synthèse de l’URIOPS, Capitalisation de l’Action GPEC - Secteur social et médico-social 2006-2011,
2011.
*L'Uniopss (Union Nationale Interfédérale des Oeuvres et organismes Privés Sanitaires et Sociaux)
est une association loi 1901 reconnue d'utilité publique. Ses missions sont d’organiser une
concertation et une représentation transversale aux secteurs traditionnels de l'action sanitaire et
sociale (personnes âgées, personnes handicapées, enfance-famille, pauvreté-exclusion, santé...) et
valoriser le secteur à but non lucratif, https://www.uriopss-ra.asso.fr
*Article L4121-3-1 du code du travail.
*Décret n°2011-354 du 30 mars 2011 relatif à la définition des facteurs de risques professionnels. Les
contraintes physiques marquées comportent les manutentions manuelles de charge (Article R.4541-
2), les postures pénibles définies comme des positions forcées des articulations et les vibrations
mécaniques (Article R.4441-1).
L’environnement physique agressif qui comprend les agents chimiques dangereux (Articles R.4412-3
et 4412-60) y compris les fumées et les poussières, les activités en milieu hyperbare (Article R.4461-
1), les températures extrêmes et le bruit (Article R.4431-1).

*risque qui sont précisés dans l’article D.4121-5 du code du travail.
 Deux décrets du 7 juillet 2011 sur les accords ou plans d’action à conclure en faveur de la
prévention de la pénibilité et sur la pénalité appliquée en l’absence de négociation
 Circulaire DGT du 28 octobre 2011 : conditions d’application du décret de juillet 2011,
contenu et procédure applicable à la validation des accords ou plans d’action précités
 Décrets du 30 janvier 2012 n°134, 136 et 137 : relatifs à la fiche de prévention des
expositions à certains facteurs de risques professionnels, à la pénalité en l’absence de cette
fiche et à l’organisation des services de santé au travail
 Arrêté du 30 janvier 2012 : proposant un modèle de fiche de prévention des expositions à
certains facteurs de risques professionnels (suivi des facteurs de pénibilité).


La pénibilité au travail au travers de la loi du 20 janvier 2014
La loi n°2014-40 du 20 janvier 2014 sur la réforme de la retraite, à la thématique*  ‘ « Mieux
prendre en compte la pénibilité au travail » consacre une dizaine d'articles à la
problématique de la pénibilité et notamment l’article 10, qui traite du nouveau « compte
personnel de prévention de la pénibilité ».
 

Les critères de la pénibilité au travail sont désormais complètement définis et applicables
depuis 2016.

Au titre des contraintes physiques marquées :

a) Les manutentions manuelles
de charges définies à l'article R. 4541-2 ;

b) Les postures pénibles définies comme positions forcées des articulations ;

c) Les vibrations mécaniques mentionnées à l'article R. 4441-1 ;

Au titre de l'environnement physique agressif :

a) Les agents chimiques dangereux mentionnés aux articles R. 4412-3 et R. 4412-60, y compris les poussières et les fumées ;

b) Les activités exercées en milieu hyperbare définies à l'article R. 4461-1 ;

c) Les températures extrêmes ;

d) Le bruit mentionné à l'article R. 4431-1 ;

Au titre de certains rythmes de travail :

a) Le travail  de nuit dans les conditions fixées aux articles L. 3122-29 à L. 3122-31 ;

b) Le travail en équipes successives alternantes ;

c) Le travail répétitif caractérisé par la réalisation de travaux impliquant l'exécution de mouvements répétés, sollicitant tout ou partie du membre
supérieur, à une fréquence élevée et sous cadence contrainte.


En 2017, quatre des dix critères (manutention manuelle de charges lourdes, postures
pénibles, vibration mécaniques et risques chimiques) de pénibilité sont supprimés lors de la
réforme du code du travail.
Or la fonction publique ne répond pas aux mêmes règles que le secteur privé pour la
plupart des dispositions relatives au droit du travail. Comme c’est le cas du compte
pénibilité. Le bénéfice du compte pénibilité tel que prévu par l’article L. 4162-1 du Code du
travail est réservé aux salariés des employeurs de droit privé et au personnel des personnes
publiques employé dans les conditions du droit privé.
Les salariés de droit public territorial comme tout fonctionnaire en général disposent d’un
dispositif spécifique de reconnaissance et de compensation de la pénibilité. Ils n'acquièrent
pas de droits au titre du compte personnel de prévention de la pénibilité*. Pour les agents
de la fonction publique, la pénibilité relève d’autres textes distincts 21 . Le droit de la fonction
Les rythmes de travail, c’est à dire le travail de nuit (Articles L. 3122-29 à L.3122-31), le travail en
équipes successives alternantes et le travail répétitif «caractérisé par la répétition d’un même geste,
à une cadence contrainte, imposée ou non par le déplacement automatique d’une pièce ou par la
rémunération à la pièce, avec un temps de cycle défini ».


*https://www.expoprotection.com/site/FR/Pénibilité-au-travail
*Circulaire CNAV du 5 février 2016, n° 2016-10
*Article L. 24 du Code des pensions civiles et militaires de retraite publique territorial distingue la catégorie dite « active », de la catégorie dite « sédentaire »
et cette distinction a un effet sur l'âge du départ à la retraite du fonctionnaire.
L’appartenance à l’une de ces catégories ne s’applique qu’aux agents titulaires et stagiaires
et ne s’applique pas aux agents contractuels non titulaires.


La pénibilité en maison de retraite : l’implication affective par la reconnaissance de la
complexité et de la dureté des métiers du grand âge
Le travail autour de la pénibilité est un « enjeu pour le secteur gérontologique)* , en raison de
l’exposition à des publics difficiles, des violences physiques ou morales, de la fin de vie et la
confrontation à la mort des personnes accueillies, les rythmes de travail dans certains
établissements ».


La notion de pénibilité dans le secteur médico-social est d’actualité 
a) Insatisfaction des professionnels qui s’intensifie,
b) Exigence de la promotion de la bientraitance afin de répondre aux attentes des
résidents et de leur famille, et qui correspond aux valeurs de prise en charge et
d’accompagnement des professionnels du secteur de la gérontologie,
c) Evolutions induites par la loi de 2002 en matière de promotion des droits des usagers
(amende financière en cas de non respect de mise en place des outils prévue par
cette loi),
d) Difficultés d’un accroissement de réglementations complexes vécues par le
personnel comme des injonctions paradoxales, car les établissements ne disposent
pas forcément des moyens en personnel octroyés par les autorités de contrôles.
 Un lien fort entre pénibilité, santé au travail et qualité de vie au travail du personnel
soignant
 Des rapports* témoignent que la qualité de vie au travail est stratégique : En 2011*, « le
mal-être au travail représente 13,5 K€ par an et par salarié en coûts directs et indirects soit
(250 milliards d’euros pour le secteur privé). Ces résultats confirment « que les valeurs de
sens comme : l’autonomie, l’utilité sociale, la reconnaissance, la qualité des relations… sont
des déterminantes essentielles du bien-être des salariés ». A l’inverse « le mal-être » a des
répercussions très négatives : « absentéisme, retard, démission… il doit donc être quantifié
et devenir un véritable outil de pilotage objectif de la performance sociale ».


 Pour le secteur médico-social, la santé au travail est désormais au cœur des politiques
publiques. Sur la base de l’ouvrage « Santé et satisfaction des soignants au travail en France
et en Europe » de Madeleine Estryn-Béhar, des « actions concrètes »* , la création des
journées pénibilités peuvent se « retrouver » et justifier sa pratique. Ainsi l’ouvrage cité, qui
est une étude européenne publié par l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique, indique
que les actions liées à la satisfaction et à la santé du personnel soignant doivent concerner
notamment : La Réponse au besoin de reconnaissance des compétences ; la prévention des
troubles psychologiques ; La réduction des troubles musculo-squelettiques ; la conciliation
entre équilibre vie professionnelle et vie personnelle :
*Selon l’URIOPSS
*Notamment Santé et satisfaction des soignants au travail en France et en Europe de Madeleine
Estryn-Behar M précité et rapport de l’IGAS intitulé, gestion des âges dans le secteur sanitaire et
social précité.
*https://www.rhinfo.com/actualites/article/details-articles
*Tiré de l’ouvrage de Estryn-Behar M.

Appliquer l’octroi de journée pénibilité, peut permettre de rentrer dans l’étude :
a) De la valorisation de certains postes notamment des postes soignants
(reconnaissance),
b) De la conciliation entre équilibre vie professionnelle et vie personnelle, si l’octroi
est effectué par exemple avec possibilité de les poser en dernières minutes,
c) De la réduction des troubles musculo-squelettiques par la diminution du nombre
d’heures légales annuelles pour les postes les plus exposés (aides-soignants).


IV) Méthodologie d’analyse du nombre de journées pénibilités

La problématique relative à l’octroi de journée pénibilité est, bien entendu, que le nombre
octroyé pour les fonctions relèvent d’un principe d’équité et non d’égalité, ce qui peut poser
des problèmes de compréhension pour les salariés du secteur médico-social, très attaché à
l’ « égalitarisme », notamment concernant la gestion du temps de travail.
 Aussi le mode de négociation pourrait être basé sur les orientations réglementaires
existante tout secteur confondu pour celles relatives à la pénibilité :
a) Une concertation entre l’employeur et les représentants du personnel.
b) Un travail d’analyse des modalités d’exposition des travailleurs aux facteurs de
pénibilité, à partir de critères objectifs préalablement discutés. Ces critères peuvent
comporter des seuils, des volumes, des limites, des intensités ainsi que des durées
quotidiennes et/ou hebdomadaires et des fréquences d’exposition ou des types de
tâches contraignantes et s’appuyer sur certains indicateurs donnés par le code du
travail (exemple : valeurs limites d’expositions au bruit, valeurs limites d’expositions
à des produits chimiques), les tableaux de maladie professionnelle, les
recommandations de la CNAMTS ou des normes (ports de charges), etc.
c) S’appuyer en priorité sur le document unique d’évaluation des risques (DUER), sur les
conseils du médecin de prévention et du conseiller prévention.
d) S’inspirer des thèmes obligatoires prévus par la loi pour prévenir la pénibilité dans le
secteur privé. Ainsi L’article D. 138-27 du code de la sécurité sociale prévoit six
thèmes possibles.
- « La réduction des polyexpositions aux facteurs mentionnés à l'article D. 4121-5 du
code du travail ;
- L'adaptation et l'aménagement du poste de travail ;
- L'amélioration des conditions de travail, notamment au plan organisationnel ;
- Le développement des compétences et des qualifications ;
- L'aménagement des fins de carrière ;
- Le maintien en activité des salariés exposés aux facteurs mentionnés à l'article D.
4121-5 du code du travail.
La création de journée pénibilité rentrerait dans le thème prévu par le code du
travail relatif à « l’amélioration des conditions de travail, notamment au plan
organisationnel » c’est-à-dire aménagement d’horaire mais aussi de toutes les mesures
favorisant l’articulation des temps privés et professionnels ou la répartition de la charge
de travail au sein des équipe…

*Issu de https://www.travailler-mieux.gouv.fr/
*CNAMTS : Caisse Nationale Assurance Maladie Travailleurs Salariés

L’analyse de la journée pénibilité peut également être faite au regard du guide de
prévention du Code du Travail.
 « Pour guider la prévention dans les accords d’entreprise ou les plans d’actions le code du
travail 28 fixe 8 principes généraux de prévention facilitant le choix et la nature des mesures
pouvant être engagées :
- Eviter les risques et évaluer les risques qui ne peuvent être évités,
- Combattre les risques à la source,
- Adapter le travail à l’homme en particulier en ce qui concerne la conception des
postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de
travail et de production en vue de limiter le travail monotone et le travail cadencé et
de réduire les effets de ceux-ci sur la santé,
- Tenir compte de l’évolution des techniques,
- Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n’est pas dangereux ou par ce qui est
moins dangereux,
- Planifier la prévention en y intégrant dans un ensemble cohérent, la technique,
l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence
des facteurs ambiants,
- Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les
mesures de protection individuelle,
- Donner les instructions appropriées aux travailleurs ».

 Pour faire disparaître ou réduire de manière significative les facteurs de pénibilité, les
mesures de prévention doivent s’attaquer aux causes. On parle de prévention primaire,
chaque fois que l’anticipation des situations de travail permet d’éviter ou de supprimer
l’exposition à une nuisance. Lorsque l’exposition ne peut être évitée 29 on parle alors de
prévention secondaire. Lorsque l’exposition produit des effets sur la santé, des mesures de
prise en charge, d’accompagnement et d’allègement des postes de la victime peuvent être
envisagées. On parle alors de prévention tertiaire.
L’accord ou le plan d’action doit privilégier les préventions primaires et secondaires.


 Au regard de cette définition la création de journée pénibilité est un mode de prévention
tertiaire organisationnel, car il peut être considéré comme un allégement de poste de
certains salariés (diminution du nombre d’heure légal annuel), et donc une évolution des
rythmes de travail.


 S’agissant d’un mode de prévention tertiaire, l’octroi de journée pénibilité ne constitue
donc pas une mesure ayant un impact réel et direct sur la pénibilité, mais davantage un
dispositif d’accompagnement et complémentaire à d’autres mesures concrètes.
 

La base juridique de la création des journées pénibilité dans la fonction publique
territoriale.
L’article 2 Modifié par le Décret n°2011-184 du 15 février 2011 - art. 55 (V) du décret
n°2001-623 du 12 juillet 2001 pris pour l'application de l'article 7-1 de la loi n° 84-53 du 26
janvier 1984 et relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction
publique territoriale dispose que « L'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement
peut, après avis du comité technique compétent (désormais le comité social territorial)
réduire la durée annuelle de travail servant de base au décompte du temps de travail défini

*Article L. 4121-2 du code du travail.
*Par exemple dans les situations existantes où la configuration de locaux anciens ne permet pas de
supprimer la nuisance, des mesures correctives peuvent permettre d’en réduire les effets.

*au deuxième alinéa de l'article 1er du décret du 25 août 2000 susvisé pour tenir compte de
sujétions liées à la nature des missions et à la définition des cycles de travail qui en résultent,
et notamment en cas de travail de nuit, de travail le dimanche, de travail en horaires décalés,
de travail en équipes, de modulation importante du cycle de travail ou de travaux pénibles ou
dangereux » ; il est donc possible juridiquement de créer des journées pénibilité réduisant la
durée annuelle de travail au lieu et place des congés supplémentaires illégaux.

V) La conduite du changement : Vers une organisation apprenante

La conduite du changement devra être continue et menée dans une posture de remise en
question permanente afin de s’orienter vers « une organisation apprenante ». Selon Isabelle
Marpeau*, cette logique est à rapprocher « du changement en tant que processus de
création de sens ». L’ensemble des salariés auront à « interpréter » les situations de travail,
explorer les conditions de travail, l’organisation du travail pour identifier en quoi elles
représentent des facteurs de pénibilité. Ce processus de « sensemaking » semble très
adapté à ce type de changement qui nécessitera également de modifier certaines habitudes
de travail, de remettre en cause des pratiques porteuses de pénibilité car il facilite l’adhésion
au changement et propose une construction collective d’un nouveau sens induit par la loi et
les politiques publiques avec une difficulté majeure : faire accepter par les autres catégories
professionnelles un « découpage » de l’organisation en sous systèmes « groupes métiers » car les
métiers du soin ne sont pas exposés aux mêmes facteurs de pénibilité que ceux de la restauration ou
encore de l’entretien des locaux. Stratégique car il permet de refonder le dialogue social car au
regard des textes « La pénibilité est donc devenue un terrain d’action pour l’amélioration des
conditions de travail dans l’entreprise à la charge de l’employeur, mais également des
représentants des salariés » voire un groupe ad hoc, à la fois paritaire et pluridisciplinaire et
avec le développement d’une réflexion partenariale avec des organismes ou instances
spécialisés (INRS, l’ARACT, la CARSAT, l’OETH…).

*MARPEAU I, La loi sur la pénibilité au travail : opportunité de changement ou contrainte
supplémentaire pour les EHPAD ? Mémoire de Mastère, ESCEM, 2012.
*Le modèle sense-making offre une perspective constructiviste pour l’étude de la relation des
individus et des groupes à l’information. La compréhension qu’ont ces derniers d’une situation, de
son contexte et de leur résolution s’appuie notamment sur leurs connaissances, leurs expériences et
leurs valeurs. https://www.cairn.info
*Dialog CHSCT, le point santé & sécurité des CHSCT des entreprises d’Alsace et de Moselle, n°4,
2011.

Post de Sylvain GUILLAUME

Directeur d'EHPAD

 


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